« Oui, la roue tourne. Toujours. En roue libre, et sans garde-boue. Alors gare aux éclaboussures ! »(Pellegrino Soricelli)
Il a tenu jusqu’au défonçage de son portail avant d’abdiquer. Il a fallu des centaines de militaires armés pour imposer les desiderata du Prince qui, entre temps, a fait pondre une immunité à vie pour sa personne le jour qu’il ne sera plus président et mis la main sur celui qui proclame sa victoire à la présidentielle du 22 février 2020. Mais il a d’abord fallu lever l’immunité de Gabriel Agbeyomé, député à l’Assemblée nationale pour orchestrer dans la légalité cette cabale contre sa personne et la toute la Dynamique Kpodzro. Seulement, l’histoire sera têtue et demain qui sait, on retiendra que cette levée d’immunité et cette arrestation étaient en réalité un mal pour un bien. Une jurisprudence qui risque d’emporter tout le monde.
Il a occupé presque tous les postes de responsabilités. Directeur général, ministre, Premier ministre, député, président de l’Assemblée nationale. Et donc« Vice-président » de la République. Parce qu’à supposé qu’au temps où il présidait l’Assemblée nationale, une « catastrophenationale » se soit produite, Gabriel Agbeyomé aurait été aussi président de la République, même en étant intérimaire. Autant dire que la nation lui doit une certaine reconnaissance. Mais au lieu de cela, c’est à la hussarde que son immunité a été récemment levée.
La constitution a été unilatéralement modifiée au gré du Prince. Afin qu’il soit assuré de ne jamais craindre pour ses richesses et ses vieux jours. C’est ainsi que Article 75 dispose : « Les anciens Présidents de la République sont, de plein droit, membres à vie du Sénat. Ils ne peuvent être ni poursuivis, ni arrêtés, ni détenus, ni jugés pour les actes posés pendant leurs mandats présidentiels. Ils prennent immédiatement rang et préséance après le Président de la République en exercice dans l’ordre inverse de l’ancienneté du dernier mandat, du plus récent au plus ancien. Une loi organique détermine le statut des anciens Présidents de la République, notamment en ce qui concerne leur rémunération et leur sécurité ».
Mais parce que Gabriel Agbeyomé a été arrêté, parce que son immunité a été levée, il semble qu’il n’y aura plus d’immunité éternelle qui vaille. Parce que toute Assemblée nationale togolaise à un moment donné, peut souverainement décider de revenir sur des articles de la constitution votée par des députés antérieurs et les modifier au gré du locataire de la présidence. Ou des priorités du pays en matière de reddition de compte.
A trois jours des 60 ans d’indépendance du Togo, une frange de la population fêtera son arrestation. C’est de bonne guerre. Mais heureusement que la vie est une roue qui tourne.
Godson KETOMAGNAN / Liberté